Enjeux d'Avenir
CONTRIBUTION - Raymond Aron théorisait « l’équilibre de la terreur » en pleine guerre froide en ce que « la guerre est improbable et que la paix est impossible entre les deux blocs communistes et capitalistes.
Si les contours d’un tel antagonisme pourraient circonscrire ceux qui s’opèrent sous nos yeux dans le débat politique au Sénégal, c’est parce que le dialogue politique et la confrontation dont il pourrait faire l’objet, ne s’opèrent pas en dehors d’un contexte ou événement entre des acteurs impliqués au sein d’un processus enchevêtrant des clivages aux intérêts divergents et contradictoires. En politique le dialogue n’existe que dans la tête de ce qui croit au dialogue de surface ou de façade ou à « l’opposition républicaine et poltronne » comme narguait le président de la république. On ne lui fait pas dire. L’opposition républicaine n’existe que dans une république respectable tandis que l’opposition poltronne est absente face à un pouvoir répressif.
Le président de la république n’est pas un enfant de cœur. Bien au contraire il est un politicien redoutable qui manie aussi bien son calendrier institutionnel et électoral que ses moyens d’actions politiques tactiques ou stratégiques comme dans un jeu d’échec ou de poker. N’a-t-on pas déjà vu des élections législatives reportées pour disait-on : catastrophe naturelle ? N’a t-on pas déjà vu le mandat des députés élus par le peuple allongé à 2(deux) reprises par projet de loi et non pas par des élections ? N’avons-nous pas entendu des projets de loi de suppression du second tour ou d’augmentation de la caution des candidatures…. ?
Le dialogue politique auquel il fait appel est plutôt un dialogue explosif et incisif dont les conséquences politiques et sociales pour la stabilité du pays sont incalculables. Il faudrait que l’on y prenne garde ! Sinon comment pourrait on comprendre et interpréter un énième appel au dialogue le jour de la korité coïncidant de manière concomitante au retour de Ousmane NGOM militant du PDS au ministère de l’intérieur devant organiser les élections présidentielles de 2012 et ayant déjà évolué au même département entre 2004 et 2008. N’était ce pas lui qui nous rappelait avant 2000 que « Abdoulaye Wade parle comme un républicain mais agit comme un monarque ». Alors dans ce cas ma question est de savoir si le commis d’un monarque peut-il agir en républicain ? Ma réponse est Non, tant, tout le contentieux et la crispation des relations entre le pouvoir et l’opposition sont nées de la radicalisation de la position de l’actuel ministre de l’intérieur et d’alors.
On se souvient de sa lettre réponse à l’opposition encore fraîche dans notre mémoire autant que la suractivité de la DIC en son temps et la répression farouche des droits civiques et citoyens que leurs confère la constitution en matière de libertés publiques et individuelles. Un analyste politique l’a rappelé récemment dans une interview. Ousmane NGOM jouera un rôle décisif surtout dans le domaine de la maîtrise de l’administration territoriale censée encadrée les élections, mais surtout reconstruire par tous les moyens le capital électoral perdu dans les régions et départements lors des élections locales de mars 2009.
D’un autre côté la nomination de Bécaye DIOP au Ministère des Forces Armées et devant assurer institutionnellement la sécurité en cas de contestation électorale et qui était prêt à mettre le feu pour réprimer une manifestation de jeunes de son village natal est elle propice pour couvrir sereinement le processus électoral et assurer de manière impartiale l’intégrité, la sécurité et la sûreté territoriale en cas de contestations électorales ? Aussi, l’actuel ministre de la justice Cheikh Tidiane Sy est il un homme de dialogue pour avoir fracassé les portes d’un bureau de vote après la fermeture et clôture des votes dans sa circonscription lors des dernières élections ?
Par ailleurs, le retour de Moustapha DIAKHATE au conseil constitutionnel pour arbitrer le contentieux antes et post électoral, est t-il de nature à permettre d’assurer l’organisation transparente et sereine du processus électoral pour qui connait la proximité et le compagnonnage de ceux-ci avec le parti au pouvoir surtout pour le premier sa position dans le conflit des chantiers de Thies.
N’était ce pas cette équipe qui fût à l’ordre dans le cadre des chantiers et de l’emprisonnement de Idrissa SECK et de Bara TALL ?
N’était ce pas cette équipe qui fût aux commandes lors de l’élection de 2007 où l’issue contestataire n’a fait l’ombre d’aucun doute d’autant plus que l’ancien président de l’ONEL Moustapha TOURE n’a pas manqué de relever des irrégularités et cas de fraudes et d’actes non transparents de la part du pouvoir en place à la suite de son éviction ?
Le Président Abdoulaye Wade ne changera pas une équipe qui gagne dés l’instant qu’il dispose des moyens de sa politique et de la politique de ses moyens ! Il est évident pour tout observateur de constater que son appel au dialogue en surface regorge implicitement et en profondeur une posture de confrontation terrorisante qui fera fit d’une paix impossible. Son équipe de choc constitue une trilogie qui ne nous épargnera pas « d’une guerre de Troie » qui aura certainement lieu.
Le dialogue politique voulu par le président a d’abord été précédé par des accusations à l’égard de ses principaux opposants à l’issue des élections présidentielles de mars 2007. Il s’en est suivi une riposte pour le moins courtois de la part des ténors des partis de l’opposition qui avaient accusé la fraude à l’issue de celles-ci et se sont radicalisés en boycottant les élections législatives de juillet 2007. L’équilibre de la terreur observée pendant un moment s’est suivi par des divergences sur la désignation quant au profil du médiateur dans le processus électoral.
Et pourtant, l’alternance n’a été rendue possible en partie grâce à la volonté du Président Abdou Diouf qui avait nommé le Général CISSE et le Général NIANG équidistants de la chose politique comme ministre de l’intérieur et Président de l’ONEL. Mieux le gouvernement d’union nationale à laquelle Abdoulaye Wade a participé en 1993 n’a été facilité que par la volonté de dialogue sincère initié par le Président Abdou DIOUF et finalisé autour du code électoral consensuel de 1992.
L’exercice du pouvoir peut obéir à des logiques tactiques et politiciennes si on parle de politique « pure ». Cela est d’un moindre mal, mais pas à des logiques épidermiques et impulsives. La paix est impossible car le processus électoral qui n’a pas encore obtenu de consensus de la part de tous les acteurs est déjà biaisé et grippé par des interlocuteurs illégitimes, non crédibles et partisans et dont les seules armes se trouveront être dans la terreur.
L’opposition unie au sein de Benno et la société civile doivent revoir leur stratégie pour mettre un terme à ce régime. « Un assaut final » comme le titrait Souleymane Jules DIOP constitue une révolution qu’il faut faire et ne pas compter la vivre. De même, elle ne doit pas être surprise si demain les élections présidentielles 2012 étaient couplées avec les élections législatives. « Le Tassaro » prendrait effectivement corps avec cette énième trouvaille du président de la république. Ce serait le meilleur moyen pour les désunir avant de les achever par un autre plan politique de succession. Rappelons-nous au passage que si le poste incongru de Vice président de la république n’a pas encore trouvé de profil à l’emploi, ce n’est point du fait de l’absence de son titulaire, mais une question de timing et de calendrier s’impose. Le président de la république est un fin chirurgien et tacticien politique. Il est orienté processus et maîtrise toutes les étapes de son calendrier.
C’est ce qui nous porte à croire que les événements et échéances politiques qui auront lieu constitueront celui de tous les dangers pour notre pays. Sa démocratie arrivée à maturation un soir du 19 mars 2000 sera mise à rude épreuve, tant la sauvegarde des intérêts économiques, financiers et familiaux, mais aussi les logiques de fins de carrière politique pour certains, ne feront pas l’économie d’une confrontation. N’est ce pas le Conseiller politique du Président de la république qui déclarait que « si le PDS perdait le pouvoir nous irons tous en prison » ? C’est cette impasse politique que « les politiques » doivent épargner au pays.
Tout système politique, économique ou idéologique quel qu’il soit obéit à la même logique que la courbe de vie d’un produit ou dérive à la théorie de l’utilité marginale en microéconomie. Le PDS actuel et non autenthique est arrivé à son point de satiété ou à son stade de maturation et de perturbation en terme de système et de mode de gouvernance politique. Il épouse les symptômes d’un parti en déclin et dont les rouages et modes d’actions et de régulations sont plutôt individualisés et au service plus d’un projet consanguin que d’un projet collectif et républicain. A moins que son actionnaire « putatif » et majoritaire n’en hérite les lambeaux pour une réorganisation vers la conquête du « rewmi ». Les multiples duplications (GC), fusions absorptions (PDSL, AST) ou scissions (anciens soit disant légitimistes tels que Me Doudou NDOYE, Aminata Tall, Macky Sall, Idrissa Seck ayant créé leur propre mouvement) traduisent sa métamorphose et son manque de rationalité organique au profit d’une solidarité mécanique et opportuniste.
Cependant, à l’égard du PDS, tous les grands partis politiques au Sénégal et leurs alliés ont montré depuis plus de cinquante (50) ans leurs limites sans concourir efficacement leurs actions en finalité au profit de leurs administrés citoyens. La faillite des « politiques » est un secret de polichinelle dans ce pays. Les sénégalais ont compris aujourd’hui que la politique ne change pas absolument leur quotidien. Bien au contraire ils ont saisi et intégré que la conquête du pouvoir diffère de son exercice.
Ainsi, le renouveau républicain n’est pas dans la démocratie holistique, déductive, politiste et de façade, mais dans la citoyenneté, la démocratie participative et inductive. L’élan et le souffle nouveau dont le peuple sénégalais a besoin quant au choix de ses décideurs, de ses gouvernants et de son système de gouvernance et de l’efficacité de celui-ci dans son quotidien économique, culturel et social ne viendra pas des partis politiques traditionnels et de professionnels de la politique de la transhumance mais de leaders et de citoyens désintéressés par les privilèges attachés aux fonctions républicaines et qui serviront en lieu et place de se servir et d’asservir.
Mais encore faudrait il qu’il puisse s’organiser autour d’une plate forme de gouvernance et dans un cadre commun d’actions concertées et républicaines pour impulser le seul dialogue crédible qui puisse exister actuellement qui est celui « inclusif » entre le peuple, les citoyen et ses futurs gouvernants pour abroger leurs difficultés économiques et souffrances sociales quotidiennes.
Mohamed El Khoutoub BOP elbop2004@yahoo.fr
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